IRT : l’ancienne directrice et une cadre épinglées pour leur gestion et leur management

Prud’hommes. Le conflit qui a fait couler beaucoup d’encre entre l’ancien président de l’IRT, Patrick Serveaux, et l’ex-directrice Ariane Loupy connaît son premier épilogue. Le conseil des prud’hommes de Saint-Denis vient de dire que le licenciement pour faute grave de la directrice était justifié. Et a rejeté ses accusations de harcèlement moral. Les prud’hommes ont aussi débouté de toutes ses demandes l’ex-chef du Pôle marketing.

Licenciée avec fracas en novembre 2015 de son poste directrice de l’IRT, Ariane Loupy a contesté cette décision avec des accusations de harcèlement moral et une action aux prud’hommes en demandant plus de 331 000 euros de dommages et intérêts. Cette procédure s’est retournée contre l’ex-directrice de l’IRT.

Dans un jugement rendu mardi, le conseil des prud’hommes de Saint-Denis a effet donné entièrement raison à l’association ÀŽle de La Réunion Tourisme. Une salariée déboutée de toutes ces demandes, le cas de figure reste assez rare devant les prud’hommes.

Pour la juridiction, le licenciement d’Ariane Loupy repose bien sur une faute grave et le harcèlement moral à son encontre “n’est pas caractérisé”. À travers les motivations des conseillers, c’est surtout la gestion de l’ex-directrice qui est très sévèrement épinglée. Avec pour conséquence une situation de gabegie d’argent public et la Région contrainte de colmater des trous dans la caisse.

Le conseil des prud’hommes constate en effet “un manque de suivi d’un encours bancaire” de près de 6 millions d’euros qui aurait pu placer l’IRT en situation de cessation de paiement. Il parle aussi de “manquement” et de “faute de gestion” dans des dossiers avec le Feder “qui ont généré la non prise en charge de plus de 900 000 euros de dépenses”. Le jugement fait aussi référence à de “graves irrégularités dans la passation de marché avec une société”. Avec, pour conséquence des pertes de plus de 178 000 euros en 2014 et plus de 193 000 euros en 2015.

Autres griefs de taille reprochés à l’ex-directrice : des dérapages financiers importants lors d’une opération de promotion en Chine. Au début, avait été votée une enveloppe de 31 000 euros. Mais l’opération a coûté plus de 100 000 euros. De coûteux vols en hélicoptère et des dépenses de luxe au profit de proches ont été pointés du doigt par l’IRT. Le conseil des prud’hommes reproche à la salariée de ne “s’être jamais expliquée sur ce dépassement et que cela s’apparente à un détournement de fonds”.

Les juges parlent aussi “d’insubordination” pour dire que le licenciement d’Ariane Loupy est “justifié, régulier et bien-fondé”. Enfin sur ses accusations de harcèlement moral de la part de Patrick Serveaux, ancien président de l’IRT, le conseil des prud’hommes constate qu’elle “ne démontre aucun fait” qui permette de “présumer l’existence d’un harcèlement moral”.

Avocat de l’IRT, Me Alain Antoine, s’est dit, hier, “pleinement satisfait” de cette décision. “Il s’agissait de dossiers particulièrement techniques et difficiles que les juges ont bien compris. Ils ont rendu une décision parfaitement motivée et n’ont pas eu le moindre doute tant sur la réalité que sur l’extrême gravité des faits reprochés. Il est vrai qu’ils sont extrêmement graves à un point tel qu’ils pourraient engager la responsabilité pénale de leurs auteurs.”

Contacté, l’avocat d’Ariane Loupy n’a pu répondre à nos sollicitations et indiquer si sa cliente allait faire appel.

Ce dossier avait “un double” avec le licenciement en novembre 2015, là aussi médiatisé, d’une proche collaboratrice de l’ex-directrice : Cyrille Barrieu, responsable du pôle marketing. Cette dernière a elle aussi été déboutée de toutes ses demandes. La décision a été rendue le 13 décembre dernier. Et là aussi la procédure s’est retournée contre son auteure.

Si les juges ne retiennent pas les mêmes griefs sur la gestion de plusieurs dossiers, ils considèrent que son licenciement est justifié car “caractérisé par une faute grave”. Cyrille Barrieu avait elle aussi dénoncé des faits de harcèlement moral. Mais le conseil des prud’hommes conclut que c’est plutôt le management de l’ancienne responsable du pôle marketing qui est problématique. Dans ses conclusions, Me Antoine, pour l’IRT, a produit une série d’attestations et courriers de salariés décrivant les dégradations des conditions de travail dans le pôle marketing avec des situations de souffrance, d’épuisement professionnel, et d’arrêt de travail.

Les conseillers prud’homaux ont relevé “un comportement duquel ressortent des dénigrements des salariés, des menaces verbales, des tentatives d’intimidation, une attitude irrespectueuse ainsi qu’un management par la terreur”. Avant de conclure à “un comportement inadapté de Mme Barrieu”.

Selon nos informations, cette ancienne cadre de l’IRT a décidé de contester de ce jugement. Son avocat, Me Olivier Chopin, souhaite ne faire aucun commentaire avant le dossier ne soit examiné par la cour d’appel.

Jérôme Talpin

jir, jeudi 22 février 2018